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Préface





                    Le metteur en scène est le pilote d’un film. Il décide de
                la destination, détermine l’itinéraire et choisit ses passagers.
                La scripte en est le moteur. Si le moteur se grippe, le
                metteur en scène est paralysé. Il peut parfois se tromper, elle
                jamais, et s’il arrive qu’il commette une erreur, c’est à elle
                qu’il confie le soin de la réparer. Quand le metteur en scène
                s’appelle Marcel Pagnol, le problème se complique. Loin des
                grandes machineries d’Hollywood, où chaque rouage est
                doublé, voire triplé, d’un rouage identique apte à prendre sa
                place, Pagnol instaure le cinéma familial, phalanstère où de
                film en film les mêmes acteurs retrouvent les mêmes
                techniciens. On tourne beaucoup en extérieur, le soleil vient
                ponctuellement chaque matin faire office de projecteur, s’il
                lui arrive de se voiler, on termine la partie de boules
                commencée la semaine précédente. Au déjeuner, les acteurs
                et les techniciens sont mêlés sans souci de hiérarchie, le
                patron à côté du machiniste, la vedette en face de la scripte.
                Pagnol veille à cet esprit d’équipe sachant que, loin d’affecter
                l’efficacité, il l’accroît. Chacun, dans son domaine, même le
                plus humble, n’est pas seulement comptable de son activité,
                il se sent investi d’une responsabilité commune. Le film,
                c’est son film, et ceux qu’on verra à l’écran ses amis. Il ne lui
                déplaît pas d’insinuer que, si Fernandel est un grand acteur,
                c’est un piètre tireur à la pétanque et Raimu un mauvais
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